Arpino, ville de Cicéron (et des femmes)

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J'ai été enchanté par la lumière d'Arpino, dans la province de Frosinone. Vous n'y êtes jamais allé ? Va là-bas. La ville est propre. Les bâtiments restaurés et rangés. Des gens sympathiques et souriants. Vous êtes dans une Italie qui semblait perdue. Le paysage est intact. Aucune éolienne ne se moque du ciel. Les architectures au loin sont mesurées, sans ravages ni cicatrices.

La fierté de la ville est Cicéron, dont la prose habille avec élégance une pensée sobre, jamais absconse, profondément laïque. Cicéron est toujours convaincant. Ce qui étonne dans son tempérament, c'est la capacité d'interpréter les valeurs humaines et spirituelles bien avant le christianisme : « La vie des morts est dans la mémoire des vivants » ; "La mort n'est pas un coucher de soleil qui efface tout mais un passage, une migration et le début d'une autre vie pour chaque vie" .

Une communauté qui, dans la fierté d'un si grand homme, préserve ses valeurs fondamentales, est destinée à être heureuse ; et on le sent encore aujourd'hui en se promenant dans les rues, à tel point que l'actualité de Cicéron se situe dans la pratique très singulière du Certamen latinum ancien et moderne. Un concours de résonance mondiale pour la meilleure traduction d'un passage du latin. Cette année, les auteurs testés pour les centaines de concurrents seront Cicero et Erasmus de Rotterdam.

Le Certamen d'Arpino est l'une des initiatives culturelles les plus importantes d'Italie. La langue latine raconte une partie fondamentale de notre histoire mais surtout de notre culture, de la littérature au droit en passant par la médecine. Bref, le latin est tout sauf une langue morte.

Le Certamen d'Arpino garde et préserve ce patrimoine grâce à des activités de sensibilisation constantes dans les écoles. Pour cette raison, le ministère entend reconnaître son importance par son patronage.

Mécène singulier, non en concurrence avec le dominant et guerrier San Michele dans l'église du même nom dans un tableau du Cavalier d'Arpino, Cicéron est présent et vivant et sa protection équivaut à celle de la Madone de Loreto : il apaise les âmes dans le témoignage d'orgueil que l'on peut lire sur une plaque en latin sur la porte médiévale d'entrée d'Orient à Arpino, Porta Napoli : « Ô Vagabond, tu entres dans Arpino, fondée par Saturne,/ ville des Volsci, Municipalité des Romains, patrie de Marcus Tullius Cicero/ Prince de l'Eloquence et Caius Marius Sept fois Consul. / L'aigle triomphal, s'étant envolé d'ici vers l'Empire, soumis à Rome / le monde entier, reconnaissez son prestige et vivez en bonne santé" .

Il est nécessaire, après des années d'oubli, de revenir à cette grandeur perdue dont il reste des vestiges dans l'Acropole avec ses murs polygonaux mégalithiques et son arc en ogive pittoresque. Les murailles se développent non seulement sur des étendues planes, où elles s'élèvent parfois à plus de six mètres de hauteur, mais aussi le long des pentes orographiques, devenant les fondations de maisons, de jardins et de palais.

À l'intérieur de l'Acropole domine la soi-disant "Tour de Cicéron" , où une chouette effraie séraphique m'attend pour une comparaison, complice imperturbable des pensées obscures. La ville s'ouvre, avec ses églises et ses palais, dans les rues animées par des gens calmes et heureux, récompensés par le privilège de vivre dominant la vallée de la Liri depuis un Olympe de pierre, comme suspendu.

La sensation s'accompagne de celle d'une protection à l'intérieur des murs de la ville, dans des édifices aussi solides que des forteresses comme apparaît la puissante structure de l'hôtel Cavalier d'Arpino, une filature de laine du XVIe siècle égayée par une vie animée et propriétaire active, Sonia Slave, qui sourit en pensant aux jours de fête qui l'attendent, entre Pâques avec la Passion vivante et le Certamen.

La ville s'anime avec la ferveur des femmes : la géologue Maria Manuel, Augusta Rea, Stefania et Chiara Quadrini. Du city club très animé, on passe aux grands espaces silencieux du Palazzo Sangermano sous l'aurore du sicilien Giuseppe Sciuti et au Palazzo Borromeo et Iannuccelli toujours majestueux et bien restauré que le sénateur Massimo Struffi a gracieusement laissé aux Australiens Alison et Katherine Holland.Arpino est vivant. Il y a aussi des lieux abrités comme la place de Santa Maria di Civita qui émerge avec sa façade baroque au-dessus du temple dédié à Mercure Lanario, protecteur des producteurs de laine.

Une autre femme gentille et cultivée préside ce sanctuaire et ressort les précieux tableaux du Cavalier D'Arpino. C'est Maria Vittoria Battiloro, tutrice, avec son mari Carlo Carrelli, plus de l'esprit que des choses de ce quartier préservé d'Arpino.

Cicéron a parlé et parle ; mais à Arpino ce sont les femmes qui agissent, et la ville vit de leur enthousiasme et de leur désir. Je n'avais pas vu une communauté aussi animée depuis longtemps, et j'aimerais en faire partie, dans un printemps sans fin.

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